lundi 14 mai 2012

[Film] Une séparation - Farhadi - 2011

Le sujet : Téhéran. Simin demande le divorce car son mari, Nader, ne veut pas la suivre à l'étranger en compagnie de leur jeune fille de onze ans, Termeh. Nader ne peut s'occuper de son vieux père atteint de la maladie d'Alzheimer et engage une aide-soignante, Razieh. La jeune femme est enceinte mais le dissimule sous un large tchador. Elle travaille, suivie de sa petite fille Samayeh. Mais un jour, Razieh laisse le vieil homme sans surveillance : furieux, Nader, rentré plus tôt, la congédie. Razieh réclame le paiement de ses heures travaillées. Nader la repousse violemment sur le palier ; celle-ci tombe dans l'escalier. La jeune femme fait une fausse couche et intente un procès à Nader. Simin, revenue soutenir son mari, paie la caution qui permettra à Nader de ne pas se retrouver en prison…

La critique : Ce film réussit le tour de force de mêler intimement des sujets aussi divers que la vie quotidienne à Téhéran, l'histoire d'un couple qui va se séparer et une affaire judiciaire prouvant la fragilité des témoignages humains. Le réalisateur - excellent directeur d'acteur - livre un film dont l'interprétation est sans fausse note pour toute la distribution. Le spectateur est mis en situation de principal témoin, mais doit remettre en cause ce qu'il pense (ou croit) avoir vu tout au long du film. Une réussite majeure.

[Livre] La république Romaine (231-42) - Jean-Michel David

Le Sujet : Jean-Michel David crédit l'évolution de la République Romaine des années 231 av J-C à 42 av J-C. Cette période marque l'évolution d'une Rome puissance moyenne du bassin méditerranéen à une Rome hégémonique. Cette évolution ne sera pas sans conséquence politique, sociale et économoque.



La critique : J'ai longtemps cherché un livre sur la République Romaine, ni trop simpliste (allant trop en surface) ni trop pointu (livre pour agrégé en histoire) En voici un de très bonne facture. L'ouvrage est évidemment dense (beaucoup d'informations condensées) mais écrit avec des mots simples (pas trop de formulation latine, ce qui est souvent le cas dans les livres d'histoire consacré à l'antiquité). Il permet de bien comprendre les difficultés rencontrées par l'aristocratie romaine pour passer de la gestion collégiale (un sénat prenant les décisions en commun) à la gestion d'un seul (évolution vers l'Empire).

jeudi 22 avril 2010

[Livre] Une histoire populaire des États-Unis - Howard Zinn - 2002


Résumé : Cette histoire des États-Unis présente le point de vue de ceux dont les manuels d’histoire parlent habituellement peu. L’auteur confronte avec minutie la version officielle et héroïque (de Christophe Colomb à George Walker Bush) aux témoignages des acteurs les plus modestes. Les Indiens, les esclaves en fuite, les soldats déserteurs, les jeunes ouvrières du textile, les syndicalistes, les GI du Vietnam, les activistes des années 1980-1990, tous, jusqu’aux victimes contemporaines de la politique intérieure et étrangère américaine, viennent ainsi battre en brèche la conception unanimiste de l’histoire officielle.

La critique :
Etonnant voyage dans l'histoire de ce pays du côté des oubliés, des perdants de ceux que l'on a pas entendu ou que l'on n'a pas voulu entendre.
Ce livre est très touffu, bourré de faits qui finissent par donner le tournis. La partie concernant la révolution américaine est particulièrement intéressante, l'auteur démontre comment l'élite américaine détourna le mécontentement populaire vers la royauté Anglaise - coupable très commode - en évitant de traiter les vrais problèmes sociaux sur le fond.
Toutefois le livre finit par lasser. La faute à un discours toujours très critique, très virulent envers l'administration américaine. Par exemple, la politique US pendant la 2nde guerre mondiale est essentiellement centrée sur des choix militaires discutables (les bombardements, l'usage de l'arme atomique) mais l'auteur occulte des aspects positifs indiscutables (la libération de pays occupés).
POur résumer : ce livre est une magnifique description de l'"envers du décor" sur ceux qui ont fait l'Amérique mais que l'histoire a injustement oublié.

lundi 14 septembre 2009

[Livre] L’entretien de M. Descartes et M. Pascal le jeune - Jean-Claude Brisville - 1985


Le Thème : notule issue de WEBTHEA.COM

Jean-Claude Brisville a eu l’excellente idée d’imaginer une rencontre entre Descartes et Pascal, tous deux philosophes, brillants scientifiques et chrétiens, l’un jésuite, l’autre janséniste. Ils se seraient rencontrés une fois, mais on n’a jamais su ce qu’ils se sont raconté.

La Critique : notule issue de WEBTHEA.COM

La confrontation de ces deux visions du monde se situe à un tournant de la vie des deux hommes. Brisville a probablement conjugué deux moments plus éloignés dans le temps d’un an ou deux pour des raisons de dramaturgie.
Descartes, déjà âgé, s’apprête à rendre visite à la reine Christine de Suède, voyage dont il ne reviendra pas ; le tout jeune Pascal a décidé d’abandonner ses recherches scientifiques pour se retirer à l’abbaye de Port-Royal. Il est justement venu demander le soutien de Descartes pour un janséniste de ses amis en difficulté, démarche dont d’évidence il ne mesure pas la provocation.
On sent bien que, pour le philosophe, les jansénistes tiennent de la secte, il semble tenir Pascal pour une âme faible, victime du charisme de Jansenius, un habile gourou, et qui va dilapider son génie à des balivernes.
A travers cette joute oratoire savamment conçue, se dessinent, non seulement deux grandes personnalités, mais aussi tout une époque. Louis XIV impose son autorité au siècle et les jésuites leur doctrine au sein d’une Église qui persécute les jansénistes.
Les « intellectuels » courent après l’idée « d’honnête homme » tandis que Galilée est condamné par le saint-Office, ce qui incite Descartes à la prudence, et ce dont Pascal le raille. Cela pourrait avoir des airs de leçon d’histoire ou de théologie, or rien de dogmatique dans ce dialogue de haute tenue, mais pas du tout abscons parce que loin des théories concrètes, il repose sur l’humanité des deux hommes.

La pièce fut créée en 1985 avec l’inoubliable Henri Virlojeux dans le rôle de Descartes et Daniel Mesguich dans celui de Pascal.

[Livre] Talleyrand - Emmanuel de Waresquiel - 2006


Le thème : Charles Maurice de Talleyrand, un homme qui s'installera au pouvoir pendant plus d'un demi-siècle de l'ancien régime des années 1780 à la révolution de Juillet de 1830. Il servira pendant ces longues années neuf régimes et prêtera treize serments. Cette biographie présente dans sa complexité les multiples facettes de Talleyrand : le fameux "diable boiteux".

La Critique : Prêtre apostat, homme politique corrompu et affairiste, comploteur de haute volée et traître à ses (différents et nombreux) maîtres MAIS un exceptionnel diplomate, spécialiste des flux financiers de son temps, grand connaisseur des rouages politiques de l'Europe de 1780 à 1836. Talleyrand n'a jamais laissé indifférent.
Lui-même indiquait dans ses mémoires: "Je veux que pendant des siècles, on continue à discuter sur ce que j'ai été, ce que j'ai pensé, ce que j'ai voulu". Il fut exaucé au-delà de ses espérances.
L'ouvrage présente l'épopée politique de Talleyrand, de l'ancien régime jusqu'à la monarchie de Juillet en passant par la Convention, le Directoire et évidemment l'Empire Napoléonien. Talleyrand est un personnage exceptionnel de l'histoire de France. On reste sidéré par son cynisme, son "talent" de corrupteur et d'affairiste, sa capacité à rebondir politiquement à travers les crises que connaîtra la France de 1789 à 1830. Il donnera toutefois en 1814 à son pays - alors au bord du gouffre - son chef d'oeuvre de diplomate : une paix en Europe juste et solide qui restera dans les annales comme une merveille d'équilibre politique. C'est bien là, l'un des grands mérites de Talleyrand : avoir compris que la France avait besoin de réformes mais ne trouverait son salut que dans une stabilité intérieure et extérieure, stabilité qu'il a toujours appelé des ces voeux.
Ce livre est toutefois d'un accès ardu, très dense avec une quantité d'informations impressionnante.